Intervention du Père Quris

A l’Assemblée Générale de la Conférence Nationale des Instituts Séculiers en France (Paris – 2010)

 

Le Père Quris intervient en tant que secrétaire de la Commission épiscopale à la vie consacrée Il est aussi chargé par la CEF du lien avec les groupes participant à l’apostolat des laïcs. Il est originaire  du diocèse d’Angers.

Je suis venu ce matin avec le livre de Monseigneur Dagens :

Entre épreuve et renouveau, la passion de l’évangile,» C’est le rapport qu’a présenté Mgr Dagens en Novembre 2009. Je vais évoquer cela en écho avec ce que j’ai entendu. Le groupe de travail de Mgr Dagens était parti d’une double question des évêques : dans notre monde, on est marqué par l’indifférence religieuse (attention au monde dans lequel vous êtes) et préoccupation de la visibilité de l’Église (le mot visibilité a été très souvent nommé). ça regroupe bien vos préoccupations.

Dans ce groupe là, il y avait un constat un peu négatif sur le monde d’indifférence religieuse et une question sur les modes nouveaux de visibilités que pratiquent un certains nombres de communautés et des questions posées par le monde médiatique dans lequel on est. Pour bien poser ces questions, il faut ajouter un troisième terme, le mot évangélisation.

C’est avec cette grille là que j’ai essayé d’écouter ce que j’ai entendu et ce que j’ai envie de vous redire. Pour bien poser la question de la visibilité, ne pas oublier la question de la mission. Dans ce sens là, en entendant vos échanges, je trouve que ça rejoint les thèmes qu’évoque Mgr Dagens.

– Vous avez évoqué le paradoxe que vivent  les IS, à la fois cette vocation à être dans le monde (est-ce que l’on peut parler d’un certain enfouissement dans le monde) et comment rendre compte du trésor de notre vocation d’annoncer l’évangile. Le 1er  chapitre de Mgr Dagens, c’est aussi cela : le paradoxe chrétien, on peut apparaître dans un monde de faiblesse, on est marqué par la faiblesse et c’est dans cette faiblesse qu’on est appelé à témoigner du Christ. Il y a quelque chose de paradoxale dans la vocation chrétienne.

– Il y a une certaine évolution déjà avant la lettre aux catholiques de 1996 et là dans cette lettre préparée par Mgr Dagens, il parle de proposer de présenter la foi dans la société actuelle. Il parle d’affirmer l’identité catholique dans la société française. Comment des IS peuvent-ils se retrouver dans une telle expression ? Ce n’est pas un reflexe identitaire mais c’est une invitation, dans ce mode marqué par l’indifférence à bien percevoir ce que veut dire cette visibilité. Les IS parlent d’insertion dans le monde et lui utilise le terme d’ « inscription ». Finalement la visibilité, c’est inscrire dans les réalités du monde (et ça rejoint bien la vocation des IS), dans la culture, inscrire l’évangile, permettre à l’évangile de prendre chair comme dans le sein de la Vierge Marie. Donner chair à la Parole

Réfléchir à la visibilité c’est réfléchir en fonction de la mission, on dit que l’on a perdu la culture chrétienne, il s’agit de retrouver une culture de la foi, une culture de l’évangile. La vocation d’IS est de cultiver là où l’on est cet art de vivre dans la foi (notamment, la redécouverte de l’enseignement social de l’Église) il y a une culture de l’évangile y compris dans des réalités économiques, sociales. On donne chair à cela dans notre engagement personnel et collectif.

Toujours autour de la visibilité, la question n’est pas d’abord la visibilité de vos IS, c’est la visibilité de l’évangile, c’est de l’évangile dont il s’agit et du Christ. Un passage du livre invite à prendre de la distance par rapport au un seul critère d’une visibilité médiatique.

Quand on réfléchit visibilité, c’est bien de se dire que la visibilité de l’Église est dans le sacramentel (Église sacrement de salut) et se dire de quoi on est sacrement. Passer d’une visibilité médiatique à une visibilité sacramentelle, il s’agit d’être et de participer par le baptême, la confirmation et la consécration, à cette visibilité sacramentelle du ministère du salut. La 1ère visibilité, c’est le témoignage de chaque membre des IS et ce n’est pas uniquement des campagnes et des tracts à distribuer. Comment les uns et les autres rendez vous visible l’évangile et votre vocation ?

– Autour de la vie consacrée, en vous écoutant j’ai retrouvé des points auxquels je suis assez sensible : toute vocation dans l’Église est au service de tous, les charismes sont toujours pour le bien de tous. Le charisme du don de l’Ésprit pour la mission donnée à l’Église est pour le bien de tous. Il n’a de sens que s’il est partagé d’où l’invitation à partager le don que vous avez reçu, il est pour l’Église, pour qu’elle puisse vivre sa mission dans le monde. Le charisme donné aux IS de cette consécration dans le monde, de cette conviction que le monde est le lieu possible de la rencontre de Dieu, de la contemplation de Dieu, le lieu de la vocation sacerdotale de tout baptisé, faire grandir le monde en l’offrant à Dieu.

Cette vocation a vraiment quelque chose à dire à tous les laïcs d’aujourd’hui. Vous ne pouvez pas garder cela pour vous, c’est un bien qui vous a été donné pour éclairer d’autres laïcs engagés d’une autre manière dans le monde. C’est comme cela qu’il faut jouer la visibilité de votre vocation, elle doit venir nourrir la vocation des autres. Il faudrait apprendre à dire en Église ce que l’on reçoit de la vocation des autres.

Dans l’Église il n’y a que des « ordonnés » et  des « pas ordonnés », c’est une distinction de l’ordre du ministère ordonné. Il y a des « consacrés » et des « non consacrés », c’est une autre distinction qui ne se recoupe pas. Le prêtre ce n’est pas un état de vie, c’est un ministère. Il faut faire attention dans les distinctions qu’on utilise pour ne pas les confondre.

– Autour de votre préoccupation des jeunes, les IS ont à entendre la parole des jeunes. Les congrégations religieuses ont le même réflexe. Il y a toute une recherche actuellement pour permettre à des jeunes religieuses et religieux de se retrouver pour s’approprier leurs charismes. C’est assez positif que vous puissiez le faire vous aussi en inter IS.

Autour des vocations, attention que votre désir d’appel ne soit pas : le recrutement, il faut vraiment que ça soit fondé sur la conviction que votre vocation a du sens pour aujourd’hui et que des jeunes aujourd’hui peuvent trouver sens pour répondre à l’appel du Seigneur de se consacré dans la situation où ils sont et de trouver dans la vie du monde le lieu de la rencontre de Dieu et la participation à la mission de l’Église. C’est ça qu’il faut donner à voir.

– Il serait intéressant de creuser la dimension sacerdotale de la vocation baptismale, la vocation au sacerdoce commun. Le sacerdoce commun par vocation et aussi par  consécration. Creuser cette dimension de participer à la rencontre de Dieu et à la  contemplation de Dieu au cœur du monde et aussi de  faire monter ce monde en offrande vers le Père.

– Et le siècle ? Et les grandes préoccupations du monde d’aujourd’hui ? C’est une invitation à ne pas oublier cette dimension là. Dans vos rencontres, venir avec toute cette vie du monde dans laquelle, par vocation, vous êtes insérés.

– A la fin de son livre Mgr Dagens propose une lectio divina sur les pèlerins d’Emmaüs, l’intérêt de sa méditation est de nous inviter à nous mettre du côté des disciples et après du côté du Christ. C’est très beau. Du côté des disciples, c’est deux hommes qui marchent (là où vous êtes, vous marchez avec les hommes et les femmes de notre temps, vous partagez leur désespoir, leurs tristesses) L’Église est invitée à se mettre du côté du Christ et à accepter de ne pas être reconnue (il y a là quelque chose qui sonne bien avec la vocation des IS, être bien dans la pâte humaine, être présence du Christ et accepter de ne pas être reconnu) Accepter, tout en étant visible, de ne pas être reconnu.

Ça nous invite aussi à franchir les autres étapes qui elles même nous invitent à la mission. Dans la 2ème étape, les hommes avancent, ils sont marqués par l’expérience du mal qu’ils viennent de vivre (la croix et la passion) Et si l’Église qui accepte d’être du côté de Jésus, elle se met dans la position d’ouvrir le Livre des Écritures et de trouver dans les Écritures le lieu de discernement des événements du monde.

Comment les membres des IS relèvent aussi le défi de l’Église de France aujourd’hui qui tourne autour de la 1ère annonce. Vous n’avez pas à être à côté de cet effort de l’Église. Quand on dit 1ère annonce, ce n’est pas forcément dans l’ordre chronologique des grands discours, c’est dans l’annonce de ce qui est premier pour nous, de ce qui est primordial. Comment dans la vocation d’IS se conjugue aussi avec cette dimension apostolique, de rendre compte de l’espérance qui est en nous, avec nos mots à nous, dans les situations où on est. Ça va être forcément différent suivant la situation professionnelle où le lieu où vous passez votre retraite.

La 3ème étape en se situant du côté de Jésus, l’Église est invitée à aller jusqu’à la reconnaissance que c’est dans les sacrements qu’on reçoit le salut.